Couverture ElectroniqueS n°127

Il n’y a pas beaucoup de fabricants de supercondensateurs dans le monde : raison de plus pour revenir sur le français Batscap, filiale du groupe Bolloré, qui lance une offre commerciale. Le groupe Bolloré, qui pèse 7,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires et emploie 32 000 personnes réparties dans 104 pays, s’est imposé depuis plusieurs années dans le domaine du stockage d’énergie avec deux activités composants, les batteries lithium-métal-polymère destinées aux véhicules électriques et les supercondensateurs qui visent également les automobiles, mais aussi les transports urbains et l’industrie. Issues de près de quinze années de recherche et développement, ces activités regroupent près de 180 personnes au sein de la filiale Batscap basée près de Quimper, avec des résultats sur lesquels la société n’avait encore que très peu communiqué. Or les développements des éléments et des modules de supercondensateurs sont désormais terminés et Batscap a dévoilé une gamme d’éléments standardisés adaptés aux marchés du transport lors de Décielec à Tarbes. Cette gamme repose sur des éléments d’une tenue en tension de 2,7 V avec une capacité s’échelonnant selon les modèles de 300 F à 9 000 F, ce dernier étant selon la société le plus gros élément du marché. Ces éléments sont conçus sur la base d’un matériau poreux, le carbone activé, dont la distribution des pores a été optimisée pour correspondre au plus près à la taille des ions de l’électrolyte organique, c’est-à-dire en restant suffisamment grandes pour être accessibles aux ions, mais pas non plus trop grandes ce qui gaspillerait du volume. Une tenue en courant de 1 000 A La capacité du condensateur étant fonction de la surface disponible et inversement fonction de la distance des ions à la surface, régler de manière optimale ce paramètre permet d’atteindre ces capacités exceptionnelles qui se chiffrent en centaines de farad. Par ailleurs, Batscap maîtrise un procédé de production des électrodes par extrusion en continu, afin de réduire les coûts de production – une limite économique qui a longtemps cantonné le marché des supercondensateurs à la seule fonction de sauvegarde de données en cas de coupure de courant dans l’électronique grand public. Ces composants sont constitués d’un collecteur de courant en aluminium, conçu pour assurer le transport de très fortes puissances avec un soudage laser avec le couvercle. La résistance série obtenue par ce procédé de production s’avère très faible et permet, en dépit des fortes valeurs de capacité, d’obtenir des constantes de temps de moins de 0,7 seconde, ce qui donne la possibilité de charger ou décharger en 1 à 20 secondes, et des tenues en courant pouvant grimper à près de 1 000 A. A titre d’exemple, le modèle 3 000 F est caractérisé par une résistance série de 0,2 mΩ. La construction retenue permet également d’assurer une faible résistance thermique entre le composant interne et le boîtier, mesurée à 0,6 K/W. La densité d’énergie de 6 Wh/ kg de ces éléments les classe entre les condensateurs et les accumulateurs, avec une durée de vie spécifiée à plusieurs millions de cycles de charge et décharge de forte puissance. Ces composants ont été qualifiés pour les différents tests qui permettent de valider l’utilisation du stockage d’énergie comme le cyclage avec choc thermique, les vibrations, les accélérations, les écarts de température jusqu’à 80 °C, les courts-circuits internes ou externes, les surtensions de faible durée ou l’inversion de tension, la surcharge et le feu ouvert. Une qualification contre les tests abusifs Le premier modèle commercialisé pourrait être un élément 2,7 V 650 F destiné à la stabilisation du réseau de bord des automobiles, avec un marché pressenti de plus d’un million de pièces et près de 600 tests en cours de qualification. La société a également mis au point une série de modules assemblant des éléments en série pour atteindre des tensions de 32 V à 65 V, avec une capacité associée de 250 F à 375 F. Ils sont prévus pour être assemblés en série comptant jusqu’à 15 modules, en horizontal ou en vertical. Ces modules offrent des résistances série de 3 mΩ à 5 mΩ avec un poids de 10 kg à 48 kg. L’énergie stockée va de 36 Wh à 220 Wh avec une densité de 3,6 Wh/ kg à 4,6 Wh/ kg. La puissance que ces modules peuvent fournir pendant 10 secondes avec 50 % de décharge s’échelonne entre 8,5 kW et 60 kW. En interne, ces modules sont constitués d’éléments sans bornes soudés directement par laser, afin de maîtriser les résistances de contact et la tenue aux vibrations, mais aussi la dissipation thermique par conduction des calories au capot. Le module peut ainsi être refroidi par conduction ou ventilation avec un dissipateur en option. Ils sont qualifiés pour des environnements climatiques sévères avec une étanchéité IP65 et une tenue au brouillard salin, au stockage humide et aux tests abusifs, afin d’être compatibles avec une option d’utilisation en transports en commun. Ils intègrent par ailleurs une électronique de surveillance et d’équilibrage et, leur état de charge et de vieillissement étant selon la société plus facile à gérer et prédire que celui d‘accumulateurs, seraient plus simples d’emploi. En termes d’évolution, Batscap poursuit le développement de systèmes complets assemblant plusieurs modules et une électronique de commande et assure que les coûts systèmes se situent dans la fourchette des 50 à 150 euros/ kW. Les recherches actuelles permettent en outre d’envisager un accroissement de la densité d’énergie de l’ordre d’un facteur 1,5 en améliorant l’optimisation des carbones et des épaisseurs des collecteurs de courant et des séparateurs, en réduisant les masses inactives et en augmentant les tensions. Par ailleurs, un progrès d’un facteur 3 serait également possible pour la durée de vie en maîtrisant mieux certains phénomènes de vieillissement, mais aussi la pureté des matériaux, la création de gaz et les dispersions sur les paramètres de production tels que la capacité, la résistance série équivalente ou les paramètres d’autodécharge. Des tests d’utilisation grandeur nature sont en cours sur la ligne de tramway T3 à Paris, pour vérifier si de telles solutions de stockage d’énergie peuvent permettre par exemple de couper les caténaires dans un carrefour, tant pour des raisons d’esthétique que de sécurité, tout en assurant un service continu. L’offre de Batscap en supercondensateurs comprend des éléments jusqu’à 9 000 F et des modules de forte puissance d’une tenue en tension de 32 V à 65 V.

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